Le
poème du Guru nanak
Prologue
Il
est l'éternel, l'unique, le tout-puissant, son Nom est Vérité. Il
est le créateur de chaque chose, sans peur, sans inimitié,
immortel, non-né, existant par Lui-même. C'est par la seule aide du
Guru que l'on peut le réaliser.
Restez
en son Nom*.
Vrai,
il l'était au commencement, vrai, Il l'était à travers les âges,
vrai, Il est maintenant, vrai, Il le sera toujours et à jamais.
*
Rester en son Nom signifie garder sa conscience dans le Saint-Nom ou
Verbe, c'est-à-dire pratiquer aussi souvent et aussi longtemps que
possible la technique de méditation dite « du-Saint-Nom »
tout au long de la journée. (une des quatre techniques révélées
sur La Voie).
1.
En
réfléchissant sur sa nature, on ne peut le concevoir, même si l'on
s'y essaie pendant des siècles.
En
s'abstenant de toute parole, on ne peut l'atteindre, même si l'on
reste muet pendant des siècles.
Même
si l'on possédait tous les biens de ce monde, on ne pourrait apaiser
cette faim de lui. On
peut posséder l'esprit le plus sincère qui soit, cela ne pourra
aider à l'atteindre.
Comment
est-il donc possible de le trouver, comment atteindre la Vérité,
dissiper le voile de l'illusion ? En obéissant à son dessein, comme
il l'a prévu.
2.
Toutes
les créatures sont l'expression de son dessein, mais son dessein est
au-delà de toute description.
Par
son dessein, il leur donne la vie, par son dessein les hommes
atteignent la réalisation. Par son dessein les uns sont proches, les
autres sont loin, par son dessein, ils obtiennent leurs joies et leurs
peines.
Par
son dessein les dévots gagnent leur salut*, par sa volonté, les
incorrigibles se perdent de vie en vie.
Tous
sont soumis à son dessein suprême, rien n'est hors de la sphère de
son dessin. Celui qui réalise que tout est son dessein, ne peut plus
nourrir son culte du moi.
3.
Certains
chantent sa grandeur, mais qui peut l'atteindre ? Certains louent sa
générosité, la prenant pour preuve de son existence. Nombreux sont
ceux qui chantent sa perfection et ses vertus.
D'autres
le proclament incompréhensible.
Certains
chantent qu'Il crée nos corps, puisqu'Il les
réduit
en poussière. Certains chantent qu'Il nous ôte la vie, et nous la
rend encore. Certains chantent qu'Il est distant. D'autres qu'Il est
présent en toute présence.
Il
n'est pas de fin à sa description. Innombrables sont ceux qui ont
essayé de le décrire sans réussir à le cerner.
Infatigable,
Il déverse ses bontés, alors même qu'on se lasse de les recevoir.
A chaque âge, Il n'a cessé de donner, et l'homme
n'a
cessé de recevoir.
Son
dessein dirige le monde, mais c'est libre de soucis qu'il s'en
acquitte.
4.
Le
Seigneur est vrai et vrai est son Verbe Saint. Celui qui est vrai
écoute son Nom* qui se répète avec un amour infini.
Les
hommes le prient pour recevoir ses dons qu'il distribue sans jamais
se lasser.
Que
lui offrir pour être admis près de lui ? Que chanter pour obtenir
sa Grâce ?
À l'heure « ambrosiale*** » des premières lueurs de
l'aurore,
communiez avec son Verbe Saint et méditez sur sa gloire.
Grâce
aux actes
justes**,
la vie humaine nous est
accordée.
Mais c'est par sa Grâce que l'on obtient le salut.
Reconnais
en toute chose l'immanence de celui qui est Vrai.
*
Écouter son Nom, c'est pratiquer la technique dite du « Saint-Nom »,
révélée, avec trois autres, sur La Voie. Le Nom qui se répète
est le Saint-Nom ou Verbe. Il est révélé aux aspirants à La Voie.
**Un acte juste est un acte fait depuis le bon état de conscience, le
Tao-Te-King parle du « non-agir », le « chant du bienheureux » (Bhagavad-Gîtâ) parle du service de Dévotion
ou dans l'Unité. Sur La Voie, nous parlons de « Service ».
***
Se référant à l'ambroisie ou Nectar. C'est le petit matin.
5.
Il
ne peut être ni manifesté, ni créé. Pur, il est complet par
lui-même. Quiconque le sert est honoré. Chantons-le, lui, la source
de tous les trésors.
Chantez
ses louanges et gardez son amour dans vos cœurs. Ainsi, toutes les
peines disparaîtront et la joie s'installera en vous.
De
la bouche du Guru sort la Vérité et la connaissance.
De la bouche du Guru jaillit l'esprit de Dieu.
Le
Guru est créateur, protecteur et destructeur. Même si on le
connaissait, il n'y aurait pas de mots pour le décrire. Le Guru m'a
bien appris une chose : unique est celui qui veille sur tous les êtres ; puissé-je ne jamais l'oublier.
6.
Si
je parviens seulement à lui plaire, c'est autant de pèlerinages
accomplis. Si je n'y parviens pas, tous les rites et efforts sont
vains.
De
toute sa création visible, qui n'a jamais obtenu
quoi
que ce soit sans avoir accompli de bonnes actions ?
Des
richesses spirituelles incalculables vont
apparaître,
si l'on se contente seulement de respecter les enseignements du Guru.
Le Guru m'a bien appris une chose : unique est celui qui veille sur
tous les êtres, puissé-je ne jamais l'oublier.
7.
S'il
était possible à quelqu'un de vivre pendant les quatre Yugas et
même dix fois plus, si sa réputation s'étendait sur les neuf
continents et si tout le monde lui obéissait et le suivait, si son
nom était honoré et ses louanges entendues partout de par le monde,
s'il venait à perdre la Grâce de Dieu, personne de s'occuperait
plus de lui.
Il
serait considéré comme un ver parmi les vers, et même les pécheurs
le couvriraient de blâmes.
Dieu
confère des vertus à ceux qui n'en ont pas et augmente le lot de
ceux qui en ont déjà, mais il n'y a personne qui puisse lui en
conférer aucune.
8.
En
communiant avec le Verbe, on devient un parfait yogi, un maître, un
seigneur. On comprend les secrets de la terre, du taureau* et des
cieux.
En
communiant avec le Verbe, on découvre les
régions
terrestres, les plans divins et les mondes inférieurs et l'on se
libère des tourments de la mort.
Ses
adorateurs sont toujours en extase, car en communiant avec le
Verbe**, souffrances et péchés sont détruits.
*
Le taureau est un symbole important, il représente Nandi, la monture
de shiva et son portier et il représente aussi le dharma qui
soutient le monde.
**
Communier avec le Verbe c'est méditer sur le Verbe ou Saint-Nom par
une technique appropriée, la technique dite du Saint-Nom.
9.
En
communiant avec le Verbe, on devient comme Shiva, Brahma et Indra*.
En
communiant avec le Verbe, même les êtres
malfaisants
chantent ses louanges.
En
communiant avec le Verbe, on obtient l'union qui dévoile les secrets
de l'existence, et les enseignements révélés de la connaissance**.
Ses
adorateurs sont toujours en extase, car en communiant avec le Verbe,
souffrances et péchés sont détruits.
*
Indra est le premier des huit Vashous (dieux hindouistes), juste
sous Brahma. Il est celui qui surveille attentivement les saints et
les pénitents et jaloux de leurs mérites, il fait tout pour leur
faire perdre les fruits de ces mérites.
**
La connaissance non-apprise, celle qui vient de l'initiation et de la
pratique assidue.
10.
Communier
avec le Verbe permet d'obtenir la Vérité, le contentement, la connaissance et équivaut à se baigner aux soixante-huit lieux de
pèlerinage.
En
communiant avec le Verbe, on accroît sa dignité et l'esprit reste
fermement établi dans sa méditation sur Dieu.
Ses
adorateurs sont toujours en extase, car en communiant avec le Verbe,
souffrances et péchés sont détruits.
11.
En
communiant avec le Verbe, on s'immerge
dans
un océan de vertu et l'on a la connaissance.
En
communiant avec le Verbe, même les aveugles
spirituels
trouvent leur chemin. En communiant avec le Verbe, on obtient
l'Infini.
Ses
adorateurs sont toujours en extase, car en communiant avec le verbe,
souffrances et ignorances disparaissent.
12.
Celui qui obéit à sa volonté
propre* ne possède nulle vertu et à coup sûr s'en repent. Ni
le papier, ni le crayon, ni le scribe ne pourront
jamais
décrire cette condition.
Si
immense est le pouvoir du Verbe, que
quiconque
s'y soumet réalise la plus haute extase**.
*
Le faux-ego
**
Le nirvikalpa-samadhi
13.
En
s'y soumettant, on obtient la conscience universelle, ainsi que la
conscience de toutes les sphères d'existence. En s'y soumettant, on
s'affranchit de la souffrance.
En
s'y soumettant, on se libère de l'emprise de la mort.
Si
immense est le pouvoir du Verbe, que
quiconque
s'y soumet réalise la plus haute extase.
14.
En
s'y soumettant, on suit son chemin sans faillir. En s'y soumettant,
on quitte ce monde en apothéose. En s'y soumettant, on ne s'enlise
pas dans les voies mondaines. En s'y soumettant, on arrive à établir
un contact
étroit
avec la vérité.
Si
immense est le pouvoir du Verbe, que
quiconque
s'y soumet réalise la plus haute extase.
15.
En
s'y soumettant, on atteint finalement la Libération.
En
s'y soumettant, on libère aussi tout son entourage. En s'y
soumettant, on se libère soi-même et l'on en libère bien d'autres
encore. En s'y soumettant, on échappe à la roue des incarnations.
Si
immense est le pouvoir du Verbe, que
quiconque
s'y soumet réalise la plus haute extase.
16.
Le
saint* est accepté et obtient les faveurs de Dieu. Il est l'ornement
de son seuil.
Le
saint est respecté même par les rois. Son esprit est concentré sur
le Verbe unique.
Quoique l'on puisse dire ou penser profondément, les œuvres du Créateur
sont au-delà de toute compréhension.
Le
taureau mythique, né de la compassion, est le Dharma**,
qui soutient harmonieusement et patiemment le monde. Quiconque
réalise cela connaît la Vérité.
Quel
poids écrasant ce taureau doit-il porter ! Il existe des mondes et
des mondes, en-dessus et au-dessous. Quel est le pouvoir qui les
supporte tous ?
Nombreuses
sont les espèces, les couleurs et les créatures aux noms divers.
Toutes sont écrites par la plume du Créateur. Qui peut recenser
l'immensité de sa création, et combien longue serait la liste si
quelqu'un y était parvenu ?
Que
son pouvoir est grand, que son travail est beau, personne ne peut
évaluer ô combien merveilleux sont ses cadeaux.
Par
le Verbe l'Univers vint à l'existence et des milliers de rivières
porteuses de vie ont commencé à couler.
Quelle
capacité ai-je de te décrire, Seigneur, créateur de tout ? Je suis
trop pauvre, même, pour te faire l'offrande de ma vie.
Tout
ce qui te plaît, c'est l'action juste***. Tu es immortel, ô toi
l'Unique sans forme.
*
Saint : il ne s'agit pas des saints chrétiens, mais de siddhis
ou yogis parfaits, de dévots, d'êtres réalisés par l'Observance
assidue de leur Sadhàna.
**
Taureau mythique, dharma, Nandi aussi, la monture et le portier de
Shiva. Selon les hindouistes et les sikhs le monde et le ciel sont
soutenus, portés par un taureau qui symbolise le dharma. Ce mot,
dharma, a plusieurs significations, ici, il veut dire « loi
naturelle ». Le mot sanskrit signifie « porter,
soutenir »
***
L'action juste est celle qui est faite en conscience du Verbe et sans
attendre de fruits en retour. C'est le Service, pour La Voie, le
Service de dévotion, pour le chant du bienheureux (Bhagavad-Gîtâ)
et le non-agir du Tao-Te-King.
17.
Innombrables
sont les prières, et innombrables les voies d'adoration.
Innombrables sont les cultes et innombrables les ascèses et
pénitences.
Innombrables
les écritures Saintes, et innombrables ceux qui récitent les Védas
de mémoire ! Innombrables les Yogis dont l'esprit reste détaché du
monde.
Innombrables
sont les saints qui chantent ta grandeur et ta sagesse.
Innombrables
ceux qui pratiquent la Vérité et la charité.
Innombrables
sont les héros qui bravent courageusement l'acier de leurs ennemis.
Innombrables tes dévots qui te contemplent en méditation silencieuse.
Quelle
capacité ai-je de te décrire ? Je suis trop pauvre, même, pour te
faire l'offrande de ma vie.
Tout
ce qui te plaît, c'est l'action juste*. Tu es immortel, ô Toi
l'Unique sans forme.
*
L'action juste est l'action faite en conscience du Verbe (sur La
voie : Saint-Nom), le « Tao-Te-King » parle de
non-agir, le « chant du bienheureux » de Service dans
l'Unité ou Service de dévotion.
18.
Innombrables
sont les sots, les ignorants et les aveugles spirituels. Innombrables
les voleurs, les malhonnêtes, prospérant sur des biens mal acquis.
Innombrables
ceux qui exercent la tyrannie et l'oppression. Innombrables les
coupeurs de gorges qui pratiquent leurs crimes haineux. Innombrables
ceux qui se prélassent toute leur vie dans la faute.
Innombrables
les menteurs qui pratiquent la fraude et la fausseté. Innombrables
les ignobles qui consomment l'ordure comme nourriture. Innombrables
les calomniateurs, portant sur leur tête le fardeau de leur
calomnie.
Nanak,
le plus humble des humbles a dit : « Je
suis trop pauvre, même, pour te faire l'offrande de ma vie. Tout ce
qui te plaît, c'est l'action juste. Tu es immortel, ô toi l'Unique
sans forme. »
19.
Innombrables
sont tes Noms et innombrables tes demeures. Au-delà de toute
atteinte sont tes innombrables Royaumes. Même le mot innombrable ne
parvient pas à te décrire.
Par
les mots, nous te nommons et te louons, et par les mots, nous parvenons
à te connaître et à chanter tes hymnes.
Par
les mots, nous parlons et écrivons sur toi. Par les mots, la destinée
s'inscrit sur notre front. Mais, celui qui écrit est au-delà de
notre portée. Comme il ordonne, ainsi, nous recevons.
Aussi
grande est sa création, aussi grand est son Verbe. Il n'est pas
d'endroit où son Verbe ne soit pas.
Quelle
capacité ai-je de te décrire ? Je suis trop pauvre, même, pour te
faire l'offrande de ma vie.
Tout
ce qui te plaît, c'est l'action juste. Tu es immortel, ô Toi
l'Unique sans forme.
20.
Lorsque
les mains, les pieds, ou les autres parties du corps sont sales, on
peut les laver avec de l'eau. Lorsque les habits sont tachés, on
peut les laver avec du savon.
De
même, lorsque l'esprit est pollué par les fautes, il ne peut être
purifié que par la communion avec le Verbe*.
On
ne devient pas un pécheur en ne prononçant que de simples mots,
mais on emporte avec soi les conséquences de ses actes**, où que
l'on aille. On récolte ce que l'on sème.
Les
hommes vont et viennent, transmigrant selon sa volonté.
*
La méditation sur le Saint-Nom (Verbe). Il existe une technique de
méditation particulière pour pratiquer cette « communion avec
le Verbe ».
**
Le karma.
21.
Les
pèlerinages, les pénitences, la pitié et la charité apportent du
mérite, mais bien peu. En
entendant, en aimant et en communiant avec le Verbe, on se baigne à
la fontaine
sacrée intérieure*.
Toutes
les vertus sont tiennes, ô Seigneur, je n'en possède aucune.
Sans
purifier nos pensées et nos actes, on ne peut se dévouer à ton
service.
De
toi sort le Verbe, Tu es l'illusion et la réalité. Tu es Vérité,
Grâce et empli de joie éternelle. Quelle était l'époque, à quel
moment, quelle était la semaine et quel était le jour, quelle était
la saison, quel était le mois, lorsque cette création vint à
l'existence ?
Les
savants n'ont pu le découvrir, autrement, ils l'auraient mentionné
dans les encyclopédies. Les commissions de sages n'ont pu le
déterminer, autrement, ils l'auraient inscrit dans le Coran. Les
yogis non plus ne connaissent pas la date, personne ne sait ni la
saison ni le mois.
Le
Créateur manifesta l'Univers, Lui seul connaît les secrets de sa
création.
Comment
m'adresser à toi, te louer ? Comment te décrire, te connaître ?
Pourtant,
tout le monde parle de toi, Seigneur, chacun essayant d'être plus
savant que l'autre.
Grand
est le Seigneur et grand est son Verbe, tout ce qu'il ordonne arrive
immanquablement.
Celui
qui se considère de lui-même comme étant grand, ne sera pas
distingué dans la vie de l'au-delà.
*
Cette fontaine sacrée intérieure coule depuis la « caverne du
crâne » ou « voûte éthérée ». Cette fontaine
est celle du Nectar. Pour y goûter, il faut pratiquer la technique
dite « Khechari-mudra » ou « Sceau de l'oiseau ».
C'est une des quatre techniques de La Voie.
22.
Par
millions se comptent les plans inférieurs et par millions les mondes
célestes. Nombreux sont ceux qui se sont épuisés à chercher leurs
limites.
Les
Védas disent la même chose. Les livres musulmans parlent de
dix-huit mille mondes, mais expliquent que c'est le même pouvoir qui
les supporte tous.
Si
l'on pouvait le définir, on l'énumérerait par écrit, mais
l'écrivain décéderait, laissant l'énumération inachevée.
Disons
que Dieu est grand, ô combien il est grand, lui seul peut le dire.
23.
Ses
adorateurs le louent, mais n'atteignent cependant jamais sa grandeur,
de même que les fleuves et les rivières se jettent dans l'océan,
sans en connaître la profondeur.
Même
les rois et les empereurs d'une extrême puissance, possédant des
montagnes de richesses et de pays ne peuvent se comparer à une
fourmi dont le cœur serait empli d'amour pour Dieu.
24.
Infinies
sont ses louanges et infinies les façons de les chanter. Infinies
sont ses œuvres, infinis ses dons. Infinie sa puissance et infinie
sa profondeur. Infinie est sa création et infinies Ses limites.
Infinie la recherche constante des hommes à en connaître les
extrémités, mais ses limites ne peuvent être perçues.
Personne
n'a jamais connu ses limites, plus on en parle, plus il reste à en
dire.
Grand
est le Seigneur et élevée est sa demeure. Mais, encore plus grand
est son Verbe Saint.
Ce
n'est qu'en s'élevant jusqu'à lui que l'on peut percevoir sa
splendeur. Sa grandeur n'est connue que de lui seul, et ce n'est que
par sa Grâce que l'on peut s'élever jusqu'à Lui.
25.
Sa
bienveillance est au-delà de toute description. Il est le grand
donneur, sans rien attendre en retour. Nombreux sont les guerriers,
mendiant à sa porte et encore plus nombreux les autres restant à
venir.
Nombreux
sont ceux qui ruinent leur vie en péchés. Nombreux, ceux qui
reçoivent ses dons, et, en en jouissant pleinement, délaissent leur
bienfaiteur.
Nombreux
ceux qui endurent la détresse et la privation, mais ce sont là
aussi tes dons, ô Seigneur.
C'est
par ta volonté que l'on est libéré de nos liens et personne n'est
en mesure de discuter tes décisions. Si un homme osait s'interposer,
il réaliserait son erreur par la souffrance qu'il rencontrerait.
Nos
besoins sont connus de lui seul, et lui seul les satisfait, mais bien
rares sont ceux qui le reconnaissent.
Celui
à qui il a donné le don de chanter
ses louanges*,
celui-là devient le roi des rois.
*
Le Satsang (un
des trois piliers de La Voie)
peut-être considéré comme le fait de chanter ses louanges ainsi
que les « hymnes », tel Aarti et autres chants
dévotionnels.
26.
Inestimables
sont ses pouvoirs, inestimable est leur fréquentation, inestimables
ses propagateurs, inestimables ses dons.
Inestimables
ceux qui viennent à lui, inestimable est ce qu'ils obtiennent.
Inestimable est son amour, inestimables ceux qui s'y perdent*.
Inestimable
est sa loi, inestimable est sa cour. Inestimables les balances de sa
justice, inestimable leur mesure. Inestimables sont ses dons,
inestimables ses commandements.
Inestimable,
ô combien inestimable, cela ne peut être dit. Ses adorateurs, en
chantant ses louanges, se sont noyés dans son amour.
Les
Védas et les Puranas** parlent de Lui. Les savants discutent à son
sujet. Brahma
et Indra***
chantent Ses louanges, ainsi que Krishna et ses dévotes.
Shiva
et les siddhas**** le chantent aussi, ainsi que les nombreux bouddhas
qu'il a créés.
Les
démons et les dieux, tous chantent ses louanges, de même que les
demi-dieux, les hommes, les sages et les dévots.
Innombrables
ceux qui parlent de Lui, et innombrables ceux qui sont sur le point
de le faire. Encore plus nombreux ceux qui sont morts en train de
chanter sa gloire.
Même
en créant encore plus d'êtres qu'il a déjà créés, personne ne
sera capable de mieux l'exprimer. Le Seigneur peut être aussi grand
qu'Il lui plaît. Sa grandeur n'est connue que de lui seul.
Si
un homme prétendait pouvoir le connaître, il serait le plus sot
parmi les sots.
*
Pour s'y retrouver.
**
Puranas, sortes d'encyclopédies.
***
Brahma est le Dieu créateur et Indra serait le Roi des dieux, dans
la mythologie polythéiste hindouiste.
****Siddhas,
yogis réalisés.
27.
Que
ta porte est belle et splendide ta demeure, du haut de laquelle tu
contemples ta création.
Innombrables
les sons joués par les musiciens. Innombrables les mesures et
accords, et innombrables les ménestrels. Le vent, l'eau et le feu
chantent ta gloire.
Le
Seigneur de la loi chante à ta porte. Vers Toi chantent Chitra et
Gupta, qui inscrivent nos bonnes et mauvaises actions, et en
informent le Seigneur de la loi, afin qu'il puisse juger.
Vers
Toi chantent Shiva, Brahma et la déesse Parvati, rendue si gracieuse
par tes soins. Vers toi chante aussi Indra, assis sur son trône, à
ta porte, entouré de ses déités.
Vers
toi chantent les siddhas, en profonde méditation, ainsi font les
saints dans leur contemplation. Vers toi s'élève le chant des
ascètes, des justes, des bienheureux, aussi bien que celui des héros
indomptables.
Vers
toi s'adresse encore le chant des pandits et des rishis qui récitent
d'âge en âge les hymnes des Védas.
Vers
toi s'adresse le chant des nymphes célestes qui enchantent les
cœurs, dans le ciel, sur la terre et dans les régions inférieures.
Vers
toi chantent les joyaux que tu as créés, de même que les
soixante-huit lieux de pèlerinage.
Vers
toi s'élève le chant des valeureux guerriers, et celui de tous les
êtres provenant des quatre sources de création.
Vers
toi chantent les continents, les mondes et innombrables systèmes
solaires qui ont été créés et sont maintenus par toi.
Tous
ceux qui te plaisent te chantent ; tes saints emplis d'amour sont
noyés dans ton Verbe.
Tant
d'autres sont encore là pour te chanter et qu'on ne peut tous
nommer, comment pourrais-je les prendre tous en considération ?
Lui
et lui seul est le Vrai Maître éternel. Il est Vérité et Vrai est
son Verbe Saint. Il est et existera à jamais et pour toujours, Lui
qui a créé toute la création, restera après la destruction de
celle-ci.
Lui
qui a créé la nature avec ses innombrables couleurs et formes,
continue de créer de nombreuses espèces. Il contrôle toute sa
création et tous les êtres de la manière dont cela plaît à sa
grandeur. Il ne fait seulement que ce qu'il lui plaît.
Personne
ne peut jamais rien lui dire. Il est le Roi des rois, le Seigneur
tout-puissant et notre rôle est de nous soumettre à sa volonté.
28.
Ô
amoureux de la Vérité, que le contentement soit vos boucles
d'oreilles, l'humilité votre bol de mendiant, la méditation
constante sur Dieu*, les cendres qui couvrent votre corps**.
Que
la préparation à la mort soit votre habit, et que votre corps reste
aussi pur que celui d'une vierge. Que votre foi en le Seigneur soit
votre bâton de pèlerin, que votre plus haute spiritualité consiste
à vous élever à la fraternité universelle, et que la maîtrise de
votre mental soit votre victoire sur le monde.
Gloire,
gloire à lui seul, l'Être Premier, pur, sans commencement et sans
fin, le Seigneur indestructible qui est le même depuis toujours.
*
La méditation constante sur Dieu n'est possible que s'il ne s'agit
pas d'une méditation profonde, telle celle que l'on fait assis sur
son coussin de méditation. La méditation constante sur Dieu est le
Service, un des trois piliers de La Voie. Lao-Tse parlait du
« non-agir », dans le Tao-Te-King, dans le chant du
bienheureux (Bhagavad-Gîtâ), il est question aussi du service. C'est
une méditation grâce à une technique « portable ». les
bouddhistes ont la « respiration consciente ».
**
Ici, il est fait allusion aux Saddhus, en Inde, qui sont des sortes
d'ascètes errants dont le corps est recouvert de cendre.
29.
Que
la connaissance* soit votre pain, que la compassion devienne votre
serviteur.
Soyez
à
l'écoute de la musique divine**
qui résonne en vous et dans tous les cœurs.
Il
est le Seigneur Unique, régnant sur toute la création, selon sa
volonté.
Le
désir de posséder fortune et pouvoirs occultes égare les amoureux
de la Vérité, les pratiquants mystiques.
Il
gouverne les principes d'union et de séparation, réglant les
affaires du monde et déterminant la destinée de l'homme.
Gloire,
gloire à lui seul, l'Être Premier, pur, sans commencement et sans
fin, le Seigneur indestructible qui est le même depuis toujours.
*
Il est encore, et toujours, ici question de la connaissance
non-apprise, celle venue de la méditation profonde et de la pratique
assidue d'une voie spirituelle authentique (qui remette en cause les
certitudes que l'on a sur les choses et notre vanité).
**
Sur La Voie, la même que pratiquait guru Nanack, il y a une des
techniques de méditation (une des quatre) qui permet d'entendre,
d'écouter cette musique en soi (Shambhavi
Mudra).
Un des trois singes de la sagesse symbolise cette technique en ayant
ses mains sur ses oreilles.
30.
On
dit de Mâyâ*, la Divine Mère, qu'elle donna naissance à trois
dieux**. L'un chargé de créer, l'autre de préserver, et le
troisième de détruire.
Ils
agissent selon la volonté du Tout, obéissant avec exactitude à sa
volonté. Gloire, gloire à Lui seul, l'Être Premier, pur, sans
commencement et sans fin, le Seigneur indestructible qui est le même
depuis toujours.
*
Un des sens du mot, peu connu, est celui de la mère divine qui
serait à l'origine de toute la création.
**
C'est une référence à la Trimurti hindouiste, avec Brahmà,
Vishnou et Shiva.
31.
Dieu
réside dans tous les plans de la création, dans lesquels Il a placé
des trésors qui restent là, immuables, inépuisables, chacun
recevant selon sa volonté.
Ayant
tout créé, il contrôle tout. Ses œuvres sont vraies comme il est
vrai.
Gloire,
gloire à lui seul, l'Être Premier, pur, sans commencement et sans
fin, le Seigneur indestructible qui est le même depuis toujours.
32.
Si
ma langue devait se multiplier cent mille fois, et si ces cent mille
fois devaient se multiplier encore par vingt, aucune d'entre elles ne
pourrait dire le Saint-Nom du Seigneur qui se répète seul. Heureux
celui qui sait l'entendre et l'écouter tout au long de sa vie.
En
suivant cette voie, on s'élève graduellement, jusqu'à ce que l'on
soit uni à Son Verbe.
Entendant
la musique des pères célestes, même les vers de terre aspirent à
monter vers Dieu.
Mais
ce n'est que par sa grâce que les êtres atteignent leur libération.
Ceux qui pensent ou qui disent autrement ne sont que de vains
menteurs.
33.
Nous
n'avons le pouvoir, ni de parler, ni de nous taire. Nous n'avons le
pouvoir, ni de demander, ni de donner. Nous n'avons le pouvoir, ni de
mourir, ni de vivre.
Nous
n'avons le pouvoir, ni d'acquérir des richesses, ni d'éclairer
notre esprit. Nous n'avons le pouvoir, ni d'éveiller notre âme, ni
de nous libérer des liens de ce monde.
Lui
seul a le pouvoir de nous montrer le chemin. Personne n'est élevé
ni abaissé, si ce n'est par sa Grâce.
34.
Il
créa le jour et la nuit, les mois et les saisons, l'air, l'eau, le
feu. Puis il plaça la terre en tant que place d'accomplissement du
devoir (Dharma).
Il
la peupla de nombreuses créatures aux couleurs et aux formes
variées, dont les noms sont innombrables et infinis, et qui sont
toutes traitées selon leurs actes, car vrai est le Seigneur, et
vraie est son harmonie.
Ceux
qui y participent profitent de sa Grâce. C'est là que ceux qui sont
prêts se distinguent de ceux qui ne le sont pas. C'est là que la
Vérité se fait jour.
35.
Telle
est la vie dans le monde des actes dont on doit s’acquitter. Voyons
maintenant le royaume de la connaissance.
Innombrables
sont les éléments, air, eau et feu, innombrables les esprits
éveillés, Innombrables les formes aux couleurs multiples et la
beauté créés par les forces du Seigneur.
Innombrables
les champs d'activités et les montagnes d'or, innombrables les
disciples, les dévots qui y reçoivent ses instructions.
Innombrables
les soleils et les lunes, et innombrables les régions terrestres et
stellaires.
Innombrables
les parfaits, les éveillés et les initiés, et innombrables les
déités et les sages, et innombrables les joyaux étincelants
reposant au fond des océans.
Innombrables
les formes de vie et leurs différents langages, et innombrables les
lignées de rois. Innombrables les adorateurs du Verbe et les
serviteurs de Dieu. Ce Royaume est sans limites.
36.
Dans
le royaume de la connaissance, tout est illuminé de sagesse divine.
On y entend la Musique céleste*. La joie et la félicité suprêmes
règnent.
Puis
l'on pénètre dans le royaume de l'extase, où le Verbe devient un
ravissement. Là, tout y est si merveilleusement beau, que ceux qui
ont essayé de le décrire s'en sont bien vite repentis.
Ici
se développe la spiritualité, ici se font les sages et les
éveillés.
*
Cette musique peut être entendue en pratiquant une technique de
méditation dédiée, une des quatre révélées sur La Voie. Elle
est nommée « Nada » et la technique qui permet de
l'entendre est nommée « Nada-yoga ».
37.
Puis
vient le Royaume de la Grâce où le pouvoir du Verbe, seul, prévaut.
Là résident les plus braves des braves, les conquérants du mental,
qui débordent d'amour pour Dieu.
Là
résident les grands dévots comme Sita, illuminés de beauté et de
gloire ineffable. Ils vivent au-delà de la mort et de l'illusion,
ceux dont le cœur est rempli de Dieu.
Là
résident les dévots de tous les coins du monde, le visage
complètement épanoui de joie, Dieu habitant perpétuellement leur
esprit.
Le
Royaume de la Vérité est le siège de l'Unique sans-Forme et en
toutes les formes*. C'est de là qu'Il observe sa création, et là
où Il regarde, naît le contentement.
Ici
existent les mondes, les galaxies et les sphères célestes que
personne ne peut compter, et dont personne ne peut définir les
limites. De là jaillissent des mondes et des mondes de création,
tout cela sortant de son sein, soumis à sa volonté**.
Le
Seigneur regarde tout et sa contemplation le réjouit. Essayer de
décrire ce Royaume est quelque chose d'impossible à réaliser.
*
Le Tao, pour Lao-Tse qui enseignait la même spiritualité.
**
La Volonté de Dieu est sa force quand elle crée et maintient la
vie de toute la Création. Dans le Tao-Te-King, il est question de
cette force en action créatrice comme « la vertu du Tao ».
Sur La Voie, on parle du Saint-Nom ou Verbe.
38.
Que
la chasteté* devienne ton brasier, la patience ta forge, le sens
commun ton enclume et la connaissance divine ton marteau. Que la
peur de Dieu soit ton soufflet, qui embrasera le feu de la sobriété,
et dans le creuset de la dévotion, tu fondras le doux Nectar**.
C'est
dans une telle fonderie que l'homme est transformé en Verbe, mais
seuls ceux qui bénéficient de sa connaissance réussissent sur
cette voie.
Celui
qui a conscience de la Grâce est empli d'une paix éternelle.
*
Ce conseil s'adresse aux moines et moniales, aux dévots qui vivent
dans un ashram et qui ont prononcé des vœux, dont celui de
chasteté.
**
Le Nectar coule en nous et il existe une technique de méditation
ancestrale (une
des quatre de La Voie)
qui permet de goûter et/ ou de sentir ce Nectar (Khechari-Mudra
ou « sceau de l'oiseau »).
Épilogue
L'air
est le Guru, l'eau est le père, et la terre est la mère.
Le
jour et la nuit sont les deux nourrices sur les genoux desquelles se
déroule le jeu du monde.
Nos
actions, bonnes ou mauvaises, nous seront comptées et nous seront
placés, en fonction de ce que nous serons devenus à cause d'elles,
soit proches du Seigneur, soit loin de sa présence.
Ceux
qui ont communié
avec le Verbe*
n'ont plus de fardeau à supporter. Leur visage resplendit de joie et
de lumière et nombreux sont ceux qui, grâce à eux, gagnent leur
liberté.
*
Verbe ou Saint-Nom. Communier avec le Verbe est « méditer sur
le Saint-Nom », que ce soit en méditation formelle ou active,
dans le Service, ou, comme disait Lao-Tse, dans le « non-agir ».